N’y allons pas par quatre chemins, le manque d’attractivité des métiers du « prendre soin » à domicile est d’abord le résultat du trop faible niveau des rémunérations qui peinent depuis trop longtemps à dépasser le SMIC.

Le triste spectacle de billard entre agences régionales de santé, départements et caisse nationale de la solidarité et de l’autonomie concernant le versement ou le non-versement des primes COVID aux aides à domicile ne doit pas occulter un secteur historique et majoritairement structuré autour d’une convention collective de l’accompagnement, de l’aide des soins et des services à domicile (issue de la fusion de deux convention collectives déjà anciennes celles des TISF dès 1970 et celle du maintien à domicile depuis 1983)

Cette convention collective prévoit notamment trois grands principes :

− Une heure à domicile c’est 1h15 de travail effectif comptabilisant les temps de trajet, les temps de réunions, et toute sollicitation des salariés en dehors de la présence des familles.

− Un effort de formation deux fois supérieurs aux obligations légales, et ce notamment depuis la dernière réforme de la formation professionnelle.

− Le remboursement systématique des km entre chaque intervention (0.35 €/km)

Cette convention collective a aujourd’hui un défaut principal : celui d’immerger de trop nombreux coefficients sous le SMIC, ayant pour effet, pour les salariés les moins qualifiés, une stagnation de leur rémunération au SMIC pendant près de 15 ans.

Les partenaires sociaux se sont donc saisis de cette injustice et ont négocié sans relâche depuis de nombreuses années pour signer un accord en février 2020 entre l’union syndicale de branche (ADMR, UNA, FNAAP/CSF et ADEDOM) coté employeur, et la CFDT et FO coté salarié. Cet aboutissement n’est sans doute pas étranger aux nombreux rapports Libault, El Khomry, Bierry qui tous ont pointé la nécessaire revalorisation des rémunérations pour rendre plus attractif ces métiers.

Certes les autres convention devront rapidement engager des négociations. En particulier la convention collective du particulier employeur, dont le caractère rétrograde car largement inférieur au Code du Travail vient d’être mis en lumière par deux députés de bords assez différents (rapport Bonnel Ruffin Juin 2020).

L’Avenant 43 est un accord vertueux et ambitieux d’attractivité des métiers du « prendre soin » à domicile par la revalorisation des qualifications des salariés et la création de parcours professionnels.

Dès son agrément par le gouvernement, la revalorisation est immédiate et durable : une augmentation des salaires des métiers du prendre soin de 15 %.

Brigitte Bourguignon sera-t-elle la ministre du domicile ? Les 150 millions dans le PLFSS 2021 préfigurent-ils un tournant domiciliaire ?

Cette signature serait un signal fort pour l’ambition nécessaire à la loi Grand Age et Autonomie et un catalyseur à dépasser les disparités territoriales, statutaires et tous les prétextes à ne rien faire ou à toujours reporter à plus tard une revalorisation des métiers du « prendre soin » à domicile

Le Ségur a montré que l’état est capable de revaloriser tous les professionnels de tous les hôpitaux quels que soit leur statut. Pour les Ehpad, il s’affranchit de la double tutelle ARS/CD pour décider et payer 1 Milliard pour tous les salariés de tous les Ehpad, quelque soit leur statut.

Le Rubicon franchi, Il est possible de faire de même pour les Auxiliaires de Vie à domicile avec un montant équivalent. Une hausse des salaires peut facilement être convenue dans un contrat entre la CNSA, le Conseil Départemental et le Service.

Une fois la revalorisation des salaires faite, seule une structuration du secteur du « prendre soin » rendra possible une revalorisation durable de ces métiers.

L’heure d’une réforme systémique « La loi Grand Age » qui instaure le secteur du « prendre soin » a sonné. Elle ne pourra pas faire l’économie des actions suivantes :

·        Harmonisation et augmentation des tarifs APA/PCH dans tous les départements grâce à la branche autonomie.

·        Unification des conventions collectives pour tous les salariés du secteur du prendre soin à domicile, avec un salaire plancher revalorisé. Cela permettra aussi de fixer un cadre concernant les plannings, les temps de coordination collectifs, et de généraliser les autres éléments de valorisation (équipes matin/soir, temps plein, voiture de service en zone rurale, refonte des référentiels de formation….)

·        Imposition dans la convention collective du particulier employeur des conditions identiques à celles de la convention du prendre soin (salaire, rémunération du temps de transport, formation…), pour les auxiliaires de vie diplômés. Conditionnement du versement de l’APA/PCH au respect de ces règles.

La société où le « prendre soin » occupe plus de place est une société où l’on considère que la coopération est plus importante que la compétition, où les métiers de l’aide à domicile sont valorisés et où l’on cultive ce qui nous permet d’être ensemble.